L’espérance de vie à la naissance ne cesse d’augmenter depuis un siècle et demi. En plus des progrès de la médecine et de l’hygiène, un autre facteur important explique cette progression : nous mangeons moins.
L’espérance de vie à la naissance est, en France, en 2022, de 85 ans chez les femmes, et 79 chez les hommes. Les filles nées en 1900 pouvaient espérer vivre en moyenne 56 ans, et les garçons 48 ans (en tenant compte de la mortalité infantile importante).
En l’espace de 122 ans, les Françaises ont donc gagné 37 ans d'espérance de vie et les Français 42 ans. Les filles nées en 2022 devraient vivre 93 ans en moyenne, et les garçons 90 ans. Par comparaison, les femmes et les hommes âgés de 65 ans en 2022, devraient vivre respectivement 89 ans et 86 ans en moyenne.
Une grande partie de ces progrès est due à la baisse de la mortalité à la naissance.
Pour les générations nées de 1900 à 1937, l’espérance de vie a augmenté rapidement du fait d’une meilleure hygiène, de la baisse des maladies propagées par une mauvaise conservation des aliments et de l’amélioration globale de la qualité de l’alimentation. Après la guerre, la prise en charge médicale plus performante permet une nouvelle progression.
Cependant, ni l'hérédité, ni les progrès de la médecine et de l’hygiène - indéniables - ne rendent compte de la totalité de l’augmentation de l’espérance de vie. Et de très nombreux chercheurs suggèrent que les processus mêmes du vieillissement se sont ralentis fortement depuis un siècle. Pourquoi ?
En 1935, Clive McCay avait, le premier démontré que l'on peut allonger de 40% la longévité des animaux en les mettant à la diète. Pour de nombreux chercheurs, nous ajoutons des années aux années, comme les rats de McCay, surtout parce que nous mangeons moins de calories que nos ancêtres : la consommation moyenne de calories a été divisée par 2 en un siècle et demi. Or, la consommation d’énergie apparaît comme l’un des moteurs du vieillissement humain.
On mange moins parce qu’on se dépense moins du fait de l’essor des transports individuels et publics, la mécanisation de tâches, le chauffage des habitations… Tous ces bouleversements contribuent à diminuer les besoins caloriques, et à ralentir l’un des principaux facteurs du vieillissement.
Nos "centrales énergétiques" cellulaires, les mitochondries, ont besoin d’oxygène pour fonctionner, c’est-à-dire brûler le carburant apporté par les aliments et fournir de l’énergie. Or, aussi indispensable qu’il soit, l'oxygène est un poison. Plus on mange, plus on sollicite les mitochondries, plus on utilise d’oxygène, et plus on créée des sous-produits toxiques de l’oxygène comme les radicaux libres, qui abîment tous les composants cellulaires. Hélas, ces dégâts ne sont qu'imparfaitement réparés. Nos gènes auraient pu mettre au point des mécanismes anti-âge sophistiqués, des systèmes de protection performants, voire nous doter d'organes vitaux en deux exemplaires, l'un étant réparé pendant que l'autre fonctionne. Mais rien de cela ne servait leur intérêt. Pour eux qui nous ont mis au point, qui nichent depuis des millions d'années au plus profond de nos ovaires et de nos testicules, nous ne sommes que des véhicules au service d'un dessein qui nous dépasse. Nos ressources énergétiques étant limitées, les gènes préfèrent que nous les utilisions pour nous engraisser, croître, parvenir au plus tôt à maturité sexuelle, afin d'accomplir la tâche pour laquelle ils nous ont programmés : nous reproduire, et disséminer leur ADN.
Nous finirons par mourir, peut-être plus tard que nos ancêtres, mais les gènes, eux, sont immortels.